le châle – conte pour enfants
LE CHALE
Il y a longtemps de cela, vivait dans un pauvre village, un petit garçon qu’on avait appelé « petit Jean ».
Souvent seul car sa maman travaillait beaucoup pour ramener à la maison les quelques sous qui lui permettaient de nourrir sa famille, « Petit Jean » allait se promener dans la forêt, il écoutait les piaillements des petits oiseaux nouveau-nés ou encore le bruit que le lapin faisait quand il détalait sous ses pas et il admirait aussi toute cette verdure faite d’herbe, de plantes et de fleurs.
Quand il s’éloignait encore un peu plus, il passait devant une vieille bâtisse habitée par une femme âgée à qui on ne donnait pas d’âge tant elle était vieille et que les villageois appelaient « la sorcière » De quoi vivait-elle ? Comment vivait-elle ? Nul ne le savait. Autour de sa masure, se promenaient quelques poules, un chien bien vieux lui aussi et un magnifique chat noir et blanc à l’allure majestueuse.
Au début, il avait eu un peu peur de cette vieille dont on disait des choses terrifiantes mais voyant qu’il ne lui arrivait rien, il commença tout d’abord à lui sourire, puis plus tard à dire un petit « bonjour » qui s’était transformé ensuite en un salut franc et sonore. Alors le visage de la vieille femme s’était paré d’un grand sourire sans dents et assez souvent, elle donnait à « Petit Jean » un fruit ou encore quelques noix.
Puis encore beaucoup plus tard, voyant qu’il s’intéressait à la nature, elle avait commencé à lui apprendre à reconnaitre les plantes vénéneuses, celles qui soignent et aussi comment les utiliser.
Quand il rentrait à la maison, il avait essayé de parler de ses balades et de sa nouvelle amie mais devant les cris que sa mère avait poussés, le suppliant de ne plus aller voir cette femme très dangereuse, il avait promis mais en secret, il avait continué à lui rendre visite sans plus en parler à quiconque.
Pendant des années, elle lui avait transmis tout ce qu’elle savait et un jour, alors que « Petit Jean » était déjà un grand garçon de quatorze ans, elle lui avait tenu un langage bizarre :
« Petit Jean » bientôt je vais partir et tu ne me verras plus mais avant, je veux te dire que je te transmets les pouvoirs qui m’ont été donnés à ma naissance pour que tu continues après moi à aider les gens et à les soigner. On dira de toi bien des choses, on pensera que tu es le diable mais malgré tout, on viendra te voir pour que tu soignes les douleurs et les maladies et l’espace d’un instant, tu seras, dans l’esprit des visiteurs « le sauveur ».
Ce don que j’ai reçu et que je te transmets, est un don du ciel et tu as l’obligation de t’en servir sans jamais demander de paiement en retour et si tu ne le fais pas, tu seras puni par ceux que tu auras trahis et qui t’avaient fait confiance.
Et en effet quelques temps après, alors que « Petit-Jean » allait rejoindre son amie, il vit que la maison était vide, plus de mamie, plus de poules, plus de chien et plus de chat noir et blanc. Il trouva sur la poignée de la porte le châle que la vieille femme portait toujours sur les épaules et sans trop bien savoir ce qu’il faisait, il le prit, décidant que ce serait un souvenir et aussi un peu de la présence de celle qui ne reviendrait plus.
Les années ont passé, « Petit Jean » est devenu un beau jeune homme. A l’école il n’a peut-être pas été le meilleur élève mais il a fait de son mieux pour étudier les matières les plus importantes.
Bien des fois, ses copains étaient venus le trouver quand ils s’étaient fait mal en jouant ou en tombant et toujours il les avait soignés sans rien demander en retour. Comme le lui avait dit sa vieille conseillère, rares étaient ceux qui remerciaient, nombreux étaient ceux qui se moquaient ensuite.
Beaucoup plus tard encore, « Petit Jean » est à son tour devenu un vieux monsieur que tout le monde connait pour les soins qu’il prodigue à qui vient le trouver. Qui n’a-t-il pas soigné ? des vaches, des chevaux, des lapins et même des oiseaux, puis devant les merveilles que ses mains accomplissaient, les hommes à leur tour sont venus chercher de l’aide, demander un petit conseil, un soulagement à leurs douleurs ; « Petit Jean » les écoutait avec bienveillance, il réfléchissait tout en passant sa main sur le châle familier posé à même sa peau et dissimulé sous sa chemise et quand il lui semblait avoir reçu la réponse qu’il attendait, il parlait au malade, disait ce qu’il fallait faire et il apprenait quelques temps après que tout était rentré dans l’ordre et que tout le monde allait bien.
Maintenant « Petit Jean » est très vieux et il sait que bientôt, lui aussi fera un long voyage dont on ne revient pas, et que peut-être il retrouvera là-bas sa vieille amie mais une chose le tracasse : il sait, il sent qu’il lui faudrait transmettre ce don qui lui a été donné à quelqu’un avant de partir et ce quelqu’un, il ne l’a pas trouvé.
Le soir, avant de s’endormir, il prend délicatement le châle, le presse sur son cœur et en fermant les yeux il demande à sa vieille amie de lui dire comment faire.
Pour la dernière fois peut-être, il se rend au marché qui a lieu chaque jeudi à quelques kilomètres de sa maison. Il n’a rien de spécial à y faire mais il sent que quelque chose le pousse à parcourir à pied ces quelques kilomètres alors, prenant sa vieille canne qui ne le quitte plus, il part en claudiquant.
Arrivé sur la place du village, les étals sont installés depuis longtemps et chacun, à grands cris, vante ses produits : les beaux fruits ! les beaux fruits ! qui veut de mes belles pommes, de mes belles poires pas chères ? pas très loin, c’est au tour des salades et autres légumes d’être présentés aux acheteurs : Elle est belle ma laitue ! des tomates pour presque rien ! qui en veut ?
Continuant sa promenade, « Petit Jean » aperçoit dans une encoignure une petite fille qui semble avoir froid. Tout doucement il s’approche, la regarde et quand elle lève son regard vers lui, il y lit une très grande tristesse.
Comprenant qu’elle a surement très faim, il achète un bon morceau de pain qu’il remplit avec du beurre et de la confiture et quand il tend le tout à la petite, elle regarde ce qu’elle vient de recevoir avec grande surprise mais aussi avec un immense plaisir.
Pendant tout le temps qu’elle mange son festin il sent au fond de lui que quelque chose s’agite, son cœur bat plus vite, son souffle est plus fort et petit à petit, il comprend que quelque chose va se passer.
La petite est maintenant rassasiée et elle regarde son bienfaiteur avec beaucoup de reconnaissance alors, sans savoir ce qu’il fait, « Petit Jean » sort de sous ses vêtements, le châle qui l’a suivi et protégé toute sa vie et le donne à la petite fille : « voila petite fille, avec ce châle, tu n’auras plus jamais froid mais plus important encore, il te protègera et si un jour tu as l’impression qu’il te parle, écoute-le, et fais ce qu’il te dit, il ne te donnera que de bons conseils ».
L’enfant regarde ce magnifique cadeau maintenant posé sur ses épaules et déjà la chaleur pénètre son petit corps qui avait si froid il y a encore quelques instants. Elle sent confusément que ce morceau de laine est bien autre chose qu’un simple châle, c’est comme une amie qui mettrait son bras autour de ses épaules et quand elle cherche son bienfaiteur, elle ne le trouve pas, il a disparu.
« Petit Jean » est rentré chez lui, le cœur léger, des frissons de joie le traversent de part en part et il sait déjà que cette nuit, il fera le grand voyage, celui qui le conduira vers un grand jardin merveilleux dans lequel il retrouvera tous ceux qu’il a connus à commencer par sa grande amie.
Quant à la petite fille, il sait qu’elle n’était pas là par hasard, elle se trouvait sur son chemin pour qu’il la rencontre et qu’il lui transmette ses pouvoirs qui non seulement la protègeront mais en plus, lui permettront de faire le bien autour d’elle et ainsi de donner un sens à sa vie
FIN
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