la passagèe du dernier train-4ème partie

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Les mois qui vont suivre vont être très bizarres car je n’ai plus au dessus de la tête cette chape de plomb que je ne sentais pas certes, mais maintenant qu’elle a disparu, je fais la différence, alors un instant décontenancée, je vais me contenter de vivre ma petite vie de tous les jours et commencer à…. m’ennuyer. Et c’est là que tout va basculer, je ne vais pas m’en rendre compte mais c’est à ce moment que je vais donner à ma vie un tournant qu’elle n’aurait jamais dû prendre. 

  

On le sait maintenant je crois au destin, à celui auquel on participe, celui que l’on construit parfois un peu en aveugle mais malgré tout guidé par….. 

  

J’ai rencontré « Iori » dans mon travail ; nous nous relayons au chevet d’un grand malade. Iori est Yéménite, pleine de vie, très charismatique,se sentant bien partout et elle va me faire découvrir le « tel-Aviv by night »Avec elle, je vais aller danser dans des boites pour célibataires des deux sexes sur une musique des années 60, celle que j’adore et là, un boulevard s’ouvre devant moi, des rencontres à la pelle, des aventures à la louche autant de choses que je n’ai jamais vécues à ce point. J’ai 45 ans, je perçois confusément que le temps de plaire va bientôt se terminer pour moi et si j’ai encore un peu de succès, je dois en profiter pour me tricoter des souvenirs pour mes vieux jours. 

  

Cette vie que malgré tout je ne regrette pas, va durer quelques années. Je vais rencontrer des hommes  mariés mais qui se disent célibataires, des types un peu largués et qui cherchent sans le dire, une bobonne pour laver leur linge et les nourrir, d’autres pas très recommandables, mais qui heureusement ne feront que passer dans ma vie. Le seul problème c’est que ce genre de vie, incompatible et avec ma conversion, et contraire à ce dont mon âme a besoin, va m’éloigner de mon véritable chemin, je ne rencontrerai pas les gens qui auraient pu me conduire vers une autre sorte de vie et quand je m’en rendrai compte, il sera trop tard. Tout ce qui va suivre ne sera pas ce que j’aurai dû vivre ; j’espère un instant que la chance que j’ai laissé passer va repasser mais je le sais maintenant, 20 ans après il n’en sera rien. 

  

Même si je suis consternée de constater que j’ai fait une grosse bétise, la vie ne s’arrête pas pour autant ; de plus j’ai appris que lorsque l’on fait une erreur, il est inutile de se sentir coupable le reste du temps ; les erreurs sont là pour en comprendre le sens et à partir du moment où on ne les recommence pas deux fois, la leçon a été utile. 

  

Maintenant que je peux travailler au grand jour, je continue à m’occuper de personnes agées mais là, officiellement. Je suis inscrite sur la liste des aides-soignantes du plus grand hopital de Tel-Aviv et je ne manque jamais de travail. C’est ainsi que je vais oeuvrer plus de 4 ans dans une famille composée du vieillard « Stéphen » et de sa fille « shoshana » qui elle, travaille comme secrétaire dans ledit hopital et dans le service gériatrique et a donc accès à la liste des meilleures postulantes. 

  

Ces quatre ans ½ seront très dures à vivre car hormis les premiers mois destinés à faire connaissance, je me rendrai compte que je suis tombée dans une famille de parvenus, imbus de leur statut social, méprisant pour tout ce qui ne leur ressemble pas. Stéphen, 90 ans, d’origine tchékoslovaque, docteur de son état, passe son temps à raconter son passé dans lequel il a, bien entendu, un rôle primordial, faisant de tout son entourage des subalternes bien dressés et il attend de moi,que je m’incline et réponde à ses moindres désirs, mais lorsque, lors d’une douche, il croit avoir le droit de s’approcher un peu trop de moi avec un regard lubrique et que je refuse ses avances dont j’aurais dû, selon ses dires, être très fière, les choses vont se compliquer car maintenant il a peur de ma réaction vis à vis de sa fille, vais-je lui parler ? et si oui comment vais-je raconter ? dois-il parler le premier de façon à raconter l’histoire à son avantage ? 

  

Je ne sais pas ce qu’il a fait, ni ce qu’il a dit, et comment, mais sa fille va me prendre en grippe et pour un rien me rabaisser autant qu‘elle le pourra faisant de moi parfois sa bonne à tout faire.Alors je vais retrouver peu à peu le caractère que j’avais en Afrique et en France, je vais moi aussi me battre à ma manière, d’abord par le silence, ensuite par le refus non exprimé de faire les tâches qui, d’après moi, ne m’incombent pas. La tension monte chaque jour d’un cran et un jour le drame éclate ; Stéphen me fait savoir par des mots blessants dont il a le secret que je ne vaux rien, que je ne sais rien, que je ne suis rien et que des gens de mon espèce n’ont que deux droits : celui d’exécuter les ordres et de dire merci. 

  

Le choc a été rude mais grace à lui, de retour à la maison, j’écrirai un livre, «  l’Entonnoir » livre dans lequel je parle du mépris des petits blancs pour les africains lors de mon séjour en Côte d’Ivoire, mépris qui ressemble fortement à celui dont je viens de faire les frais. Quant à la suite, elle  est simple. J’ai arrêté de parler à mon malade me contentant de faire mon travail, lui, a essayé de s’expliquer, de se justifier en vain, je suis un mur et si cela ne plait pas, il faut que l’on me renvoit mais comme cela coûte très cher et qu’il faudra trouver une raison autre que la véritable, on va me supporter encore quelques temps, Stéphen va tomber malade , il est hospitalisé et vit ces derniers instants. Je suis là près de lui, je sens qu’il veut partir mais aussi que quelque chose le retient parmi nous, et tout à coup je réalise que sa kippa ( petit chapeau rond des gens croyants ) est dans le tiroir de la table de nuit ; je la sors, je la lui pose délicatement sur le crane, il prend une grande inspiration et le regard dans le vide, nous quitte pour toujours. 

  

Pendant mon séjour dans cette délicieuse famille, la guerre du golf a éclaté. Nous sommes en 1990, j’ai 52 ans, j’habite A tel-aviv un deux pièces bien grandes et un superbe balcon de 6 mètrs de long. L’immeuble s’est vidé de ses locataires le temps du conflit car ceux-ci sont aller vivre dans leur famille située dans des villes plus calmes, je suis donc seule le jour où des éclats de missile s’écrasent à 1mètre 50 de mon immeuble ravageant tout sur leur passage, coupant l’électricité, mettant le feu aux voitures en stationnement. Un instant l’immeuble à tremblé sur ses fondations, j’ai attendu qu’il s’écroule, un grand silence s’est installé jsuqu’au moment ou des bruits et des cris ont été perçus dans les escaliers ; les pompiers, la police, la télévision grimpent quatre à quatre les étages à la recherche de morts ou blessés, j’ouvre ma porte. On veut me faire sortir mais je refuse car j’ai des bêtes avec moi, 6 chats et 2 chiennes et il n’est pas question que je les laisse seules.  Les pompiers constatent qu’il n’y a pas de danger car la fumée émanant des véhicules qui brulent n’arriveront pas jusqu’à chez moi puisque j’habite à l’arrière de l’immeuble. Un micro à la main, une caméra sur l’épaule, les gens de la télé m’interroge, je raconte, bien peu de chose en vérité car c’est le 19ème missile qui s’abat sur la ville et c’est toujours la même histoire. Il n’empêche que quelques jours après , je serai invitée à participer à une émission de télé ; j’aurai mon petit instant de gloire, plus tard je recevrai des lettres de téléspectateurs ; l’un me demande en mariage (il paraît que je ressemble comme deux gouttes d’eau a une ex-amie qu’il a beaucoup aimée) et moi, j’apprécierai toujours la délicatesse des israëliens qui, croyant faire un compliment, se ridiculisent sans s’en rendre compte, une autre lettre me proposant de m’occuper d’une vieille mère bien gentille, et aussi on veut bien mettre à ma disposition une chambre puisque l’on a compris, ce qui est faux, que je n’ai plus de maison. Et puis le rideau retombe, la guerre se termine, chacun retourne à ses petites mesquineries quotidiennes. 

Publié dans : ma vie |le 18 janvier, 2010 |Pas de Commentaires »

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